Journal du conteur

À défaut d’avoir une infinité de mains…

À défaut d’avoir une infinité de mains, il est très rapide à saisir les objets tour à tour, à les lâcher, à en attraper d’autres. Néanmoins de chacun d’eux il garde au creux de sa main l’empreinte. Toutes ces empreintes accumulées, stratifiées, pèsent sur ses mains, ses mains recouvertes de cette seconde peau durcie qui les rend de plus en plus insensibles et lourdes, impotentes, inutiles. Il les tient au bout de ses bras comme deux poids morts, comme deux louches avec lesquelles il puise la substance du monde et la porte à ses lèvres et à son nez. Ceux-là aussi sont en voie d’obturation. Heureusement, il passe la plupart de son temps les yeux fermés.

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