Journal du conteur

Dans ma grande maison…

Dans ma grande maison vivent tous ceux et celles que j’aime, chacun dans sa chambre. Ils peuvent y faire tout ce qu’ils veulent, à condition qu’ils se trouvent à ma disposition quand l’envie me prend de leur présence. Harem de l’esprit, de l’amitié, de la piété filiale, et pas seulement de l’amour, ma maison devrait être mon paradis. Mais je n’y suis pas heureux : de chaque cellule, des yeux torves ou d’une terrible tristesse résignée me fixent, et m’interdisent toute approche. C’est pourquoi je ne sors plus de ma chambre solitaire.

D’ici quelques mois, un visiteur impromptu découvrira, stupéfait, cette prison remplie de cadavres, chacun dans sa cellule, toutes fermées à clé dont une de l’intérieur.

67