Au concours d’escalier…
Au concours d’escalier, comment ne voient-ils pas — tous : juges et public — que le mien, pour être de terre et non de pierre ou de bois, ou a fortiori de béton, est bien plus résistant sans être moins pratique ? Comment ne voient-ils pas non plus que, s’il monte moins haut que les autres, il raccourcit en conséquence la redescente inévitable ? Dépité, je m’assois sur sa deuxième marche, quand un vacarme de craquements et de cris me fait tourner la tête : mal conçus et trop vite construits, et trop chargés de curieux — car les modèles sont ouverts au public après l’épreuve et le verdict —, ils se sont effondrés, les autres escaliers. Plus de peur que de mal, heureusement, comme on peut l’espérer de modèles de taille modeste élevés en quelques heures. On tourne donc son attention vers le mien, seul encore debout. Prudemment, on l’essaye. On saute sur ses marches pour l’éprouver : il vibre à peine. Mais les sourires de lucidité nouvelle que j’aperçois sur certains visages ne suffisent pas : ni à corriger un verdict sans appel, ni à modifier la décision municipale de ne plus renouveler ce concours annuel au succès déclinant. Ma première participation sera donc aussi la dernière ; première — la surprise des juges était sans équivoque — et dernière fois aussi pour l’escalier de terre. Comment l’idée, la pratique essaimeraient-elles ? Espérons qu’un des curieux finalement convaincus soit de quelque influence : j’aurais du travail, et nos chutes seraient plus douces, sinon moins rares.