Journal du conteur

Deux marchands ambulants se rencontrent…

Deux marchands ambulants se rencontrent. Chacun échange la moitié de ses marchandises contre la moitié de celles de l’autre, puis leurs chemins se séparent de nouveau. Mais ils n’avancent plus si bien ni si vite qu’auparavant : comme s’ils en portaient tous deux plus qu’avant, comme si l’échange les avait alourdis ; et peu de temps après ils sont obligés de s’arrêter, en travers de la première route qu’ils trouvent. C’en est fini du nomadisme. Là où ils sont ils attendent. Bientôt d’autres hommes passent, et de nombreuses marchandises s’échangent entre de nombreuses mains. Chacun des hommes se trouve toujours plus lourd de ce qu’il a échangé que de ce qu’il a conservé ; et celui-là même qui n’aurait rien échangé, qui aurait tout donné, serait encore lourd du don même, qui l’attache au donataire. Les relations étant ainsi créées, les hommes ne purent s’éloigner bien loin, et une ville se trouva fondée.

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