Journal du conteur

Quand la vieillesse arriva sa libido se tarit…

Quand la vieillesse arriva sa libido se tarit et son sexe n’eut plus d’érections. Alors il prit un couteau et il se trancha ce sexe désormais inutile en disant : « ça fera moins lourd à porter, ça n’encombrera plus mon slip, ça ne fera plus suer mes cuisses et ça ne me gênera plus quand je marche. »

Quelques années plus tard, ses jambes cessèrent de pouvoir le porter. Il prit une scie et se les scia l’une après l’autre, avec ces mots : « de toute façon j’ai toujours eu horreur des pantalons, des chaussures et des chaussettes. »

Puis, comme beaucoup de vieux, il devint presque sourd ; mais au lieu de se réjouir comme les autres de ne plus être obligé de répondre aux importuns, il se coupa gaiement les oreilles et se perça les tympans avec un clou, ajoutant qu’il avait toujours détesté le bruit.

Devenu très vieux, une attaque le laissa paralysé du côté gauche (il était parfaitement chauve depuis longtemps) : il s’empressa d’amputer son bras gauche, s’arracha l’œil gauche avec une pince et la langue aussi parce qu’une moitié de langue ne sert à rien.

Quelques jours plus tard les médecins lui confirmèrent qu’il ne pourrait plus rien avaler, et trop heureux il s’arracha les dents une à une ; clignant de son unique œil il affirma qu’il en avait « marre de se laver les dents ».

Lorsqu’au bout de son grand âge une maladie le priva de la vue, il utilisa le scalpel qu’il avait chipé lors d’un de ses nombreux séjours à l’hôpital pour se crever l’œil droit.

Alors son cœur cessa de battre et scalpel en main il mourut. Sur ce qui lui reste de trait on peut lire l’insatisfaction éternelle de n’avoir pas pu se l’arracher, ce cœur.

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