Journal du conteur

Ils escaladaient la dernière colline…

Ils escaladaient la dernière colline. Arrivés près du sommet, le fils commença à discerner par instants un bruit vague, sourd, diffus, profond, un sifflement plus grave que celui du vent, percé de rares aigus stridents. « Les hommes » pensa-t-il. Enfin ils atteignirent la crête. Cachés derrière de gros rochers, ils observaient, écoutaient : des maisons hautes comme des montagnes montaient vers les nuages du matin, des cris, des grincements, des bruits ininterrompus agressaient leurs oreilles habituées au silence des plaines. Une intense agitation couvrait la surface entre les bâtiments, de gros véhicules circulaient à des vitesses incroyables. « Voilà les hommes, dit le père. — Où ? dit le fils. — Regarde tout en bas, entre les bâtiments et les véhicules, tu en vois quelques-uns qui marchent. » L’enfant se concentra, et il distingua finalement quelques-unes de ces créatures. Il les reconnut. « Mais ils sont comme nous ! » s’exclama-t-il, ahuri. Il regarda son père : « Nous sommes donc nous aussi des hommes ? — Qu’avons-nous besoin de ce nom ? La Terre connaît-elle son nom ? » L’enfant réfléchissait plus vite que jamais, les questions s’accumulaient. « Pourquoi vivent-ils différemment de nous ? Connaissent-ils notre existence ? — Je n’en sais doublement rien, dit le père. Pourquoi t’intéresser tant à eux ? Maintenant tu sais tout sur nous. Le soleil décline déjà, il est temps de repartir, viens. »

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