Sous le grand chapeau qui les protège…
Sous le grand chapeau qui les protège en partie du soleil, on les voit penchés presque à angle droit, les yeux baissés, scrutant le sol, une main contre les lombaires — on a mal au dos avec eux —, l’autre tenant l’anse du petit seau duquel dépasse la poignée d’une petite pelle. Ils vaguent lentement, sans guère lever les yeux ; parfois ils s’arrêtent, s’agenouillent, grattent alors le sable, peut-être tirent la pelle et creusent un instant, font miroiter entre leurs doigts quelque chose au soleil, l’observent, et presque toujours, d’un ample mouvement de bras, le jettent dans la mer proche. Que cherchent-ils demande le passant curieux ? Pas de l’or, en tout cas, lui répond-on. Celui qui par chance en trouve une pépite ne la dédaignera pas, mais ce contre quoi il l’aura échangée, ce sera seulement plus de loisir à consacrer à cette recherche éreintante d’un trésor, certes, mais personnel. Un trésor pour soi, sans valeur marchande, une chose infime, à la fois quelconque et unique, mais qui sera votre propre trouvaille : galet rond et poli, caillou translucide, coquillage brillant… — Mais il y en des milliards, partout, il suffit de se baisser pour en ramasser une pleine poignée ! — Bien sûr, et leurs différences sont minimes. Et pourtant ce sont-elles, aussi subtiles soient-elles, qui feront que tel coquillage, que presque tous auraient ignoré, acquerra pour vous la valeur d’un emblème, parmi les myriades insignifiantes des autres. Voilà ce qu’on répond, avant de s’y remettre.